La journée mondiale du handicap « vise à promouvoir la compréhension des questions de handicap ». En ce jour de mobilisation pour le soutien aux personnes extraordinaires, Tilio vous explique ce qu’est le handicap et comment s’accompagne ces particularités au quotidien et en crèche.
Qu’est-ce que le handicap ?
La plupart des personnes sait à quoi le handicap s’apparente. On parle de différence, physique ou mentale, dont l’origine peut être aussi bien génétique, qu’accidentelle, ou pathologique.
Être en situation de handicap a été défini de bien des manières et par beaucoup d’organisations nationales et internationales importantes (Convention des Nations Unies, OMS, Loi française…). C’est la loi du 11 février 2005 qui fait sujet à l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées qui donna une définition « officielle » à l’échelle nationale : « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant. » (Art.L.114).
Les personnes en situation de handicap peuvent bénéficier de nombreux droits et aides nécessaires de l’Etat afin de pallier le mieux à leurs difficultés. Bien que ces droits et ces aides permettent d’accompagner les personnes en situation de handicap, cela ne comblera pas forcément à pallier l’autonomie liée à leurs handicaps.
En France, la situation des personnes en situation de handicap s’améliore :
-Depuis maintenant 35 ans, l’inclusion pour les personnes en situation de handicap dans le marché du travail est obligatoire. Le handicap ne doit pas être vu comme un problème social entre les personnes non atteintes et atteintes, mais plutôt comme un vecteur de progrès humain et inclusif.
-La loi du 11 février 2005 portant sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a notamment permis l’inclusion des enfants en situation de handicap à l’école. En 2022, c’est plus de 430 000 élèves en situation de handicap qui sont accueillis dans des établissement scolaires, environ 67 000 élèves scolarisés en établissement hospitalier ou médico-social, et 10 272 dispositifs d’unités localisées pour l’inclusion scolaire (chiffres ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse).
Parler de handicap, c’est aussi parler de deux notions essentielles liées à ce terme : le trauma et le traumatisme. Boris Cyrulnik, neurologue, psychiatre, psychanalyste et auteur de renom dans le domaine de la petite enfanceet un point d’honneur sur la distinction entre ces deux notions.
Tout d’abord, le trauma désigne le fait objectif. En d’autres termes, il désigne directement le handicap au sens clinique. Le trauma est d’ailleurs plus facilement identifiable et décrit quand c’est un trauma visible (physique ou somatique) que psychique.
Le traumatisme, lui, est la perception subjective de la personne atteinte de handicap. La personne se représente son handicap à sa manière, et elle montre à autrui ce qu’elle veut représenter de son handicap.
Le trauma est alors quelque chose de propre à la personne et la vision objective. Alors que le traumatisme peut impacter son entourage et la représentation subjective du handicap porté.
Il est également important de parler de la notion de « déni » pour les parents d’enfants en situation de handicap. Ce mécanisme de défense psychique et inconscient consiste pour les parents à refuser la situation de handicap. Il est l’une des premières phases du deuil de « l’enfant idéal ». L’objectif des professionnels de la petite enfance est alors d’accompagner les parents pour qu’ils puissent accepter la situation de handicap de leur enfant.
L’accompagnement d’un enfant extraordinaire
L’accompagnement d’un enfant extraordinaire au quotidien passe tout d’abord par sa résilience personnelle. Le concept de résilience, souvent associé à Boris Cyrulnik, est dans le handicap un concept qui fait « ressortir [pour des personnes qui ont subi un traumatisme] des dons ou des ressources cachées qui peuvent se révéler très efficaces. La résilience consiste « à vivre avec », dans le sens ou cela fait partie de la vie de l’individu ».
Dans sa démarche de résilience, l’enfant en situation de handicap va pouvoir compter sur deux formes d’accompagnements. Tout d’abord, l’accompagnement de professionnels spécialisés ou de la petite enfance qui vont pouvoir apporter une vision objective à la situation de l’enfant mais aussi, pour les professionnels spécialisés, des analyses psychiques ou physiques. La deuxième forme d’accompagnement est la plus importante, c’est l’accompagnement par les parents. Appelés « tuteurs de résilience » par Boris Cyrulnik, les parents vont pouvoir accompagner leur enfant en situation de handicap en lui donnant leur soutien affectif, verbal et ludique. Le besoin premier pour la résilience d’un enfant face au traumatisme du handicap est la sécurité affective. Grâce à cela, il pourra affronter son traumatisme avec plus de confiance et d’espoir.
Cependant, les tuteurs de résilience que sont souvent les parents peuvent aussi avoir besoin de faire preuve de résilience. On appelle cela la résilience familiale. Cette résilience est un parcours qui se fait de façon collective dépendant de la volonté et de la capacité de résilience de chacun. La résilience familiale est alors un long chemin instable puisqu’elle va dépendre de l’évolution de la situation de handicap de l’enfant ainsi que des ajustements et adaptations de l’entourage à la situation.
L’accueil d’enfants extraordinaires en crèche est tout à fait possible. Nous avons eu l’occasion d’interviewer Marie Friedelmeyer, partenaire de notre réseau et responsable de la micro-crèche Le Bateau de Papier. Qualifiée par un diplôme d’éducatrice de jeunes enfants, elle suit la pédagogie Pikler Loczy au sein de sa micro-crèche.
Quelle était la particularité des enfants en situation de handicap que vous avez accueilli en crèche ?
C’était deux enfants atteints de trouble du spectre autistique (TSA).
Pour le premier enfant, les parents soupçonnaient sa particularité puisqu’ils avaient déjà un grand garçon atteint du même trouble. L’enfant était inscrit pour être accueilli deux jours par semaine à la crèche.
Pour le deuxième enfant, nous avons découvert sa particularité en crèche, le papa l’avait inscrit parce qu’il ne parlait pas. D’abord, on a essayé de chercher par nous-même et puis on a décidé de contacter le centre ressource petite enfance, qui est une très bonne adresse pour ce genre de situations. Alors, une éducatrice est venue observer le petit garçon plusieurs fois, puis elle a donné des pistes pour l’aider et aussi pour alerter les parents sur sa possible situation de TSA. Elle a conseillé aux parents de faire faire des tests pour préparer une prise en charge et appréhender au mieux son entrée à l’école.
Quelle forme d’accompagnement avez-vous mis en place pour l’accueil de ces enfants en situation de handicap ?
Dans notre crèche, on travaille avec la pédagogie Pikler Loczy. C’est une pédagogie avec une approche individuelle. Pour faire simple, chaque enfant a une référente dans l’équipe et donc naturellement, cette personne est particulièrement investie pour l’enfant dont elle est la référente.
L’accompagnement d’un enfant en situation de handicap en micro-crèche est plus facile puisque l’effectif est plus réduit.
Le premier enfant faisait beaucoup de sons toute la journée, qui pouvaient déranger l’ensemble de la crèche. Alors on a décidé de tout d’abord mettre en place une sécurité affective, particulièrement pour son alimentation puisque des enfants qui ont des TSA ont souvent du mal à s’alimenter. Ce qui l’a aidé c’était d’aller sur les genoux de sa référente, donc on a fonctionné ainsi. On a aussi mis en place une approche autour de la musique, puisqu’il aimait beaucoup les sons.
Le deuxième enfant ne mangeait pas du tout, il se mettait dans des colères pas possibles qui rendait les choses difficiles pour la référente. On a donc cherché des solutions avec les parents, et nous avons opté à une réduction de 3 journées à 3 demi-journées en crèche. On lui donnait à chaque fois un gouter vers 10h30 puisqu’il aimait le sucré, puis quand il rentrait chez lui, il mangeait normalement. On le faisait dormir dans la poussette puisque c’était le seul endroit où il voulait et pouvait dormir
C’était un enfant qui avait besoin de protéger son espace de jeu parce qu’il n’aimait pas que les autres enfants aillent dans son espace. Le groupe a été vraiment super, les autres enfants comprenaient et se sont très bien adaptés à sa situation.
A la fin de l’accueil en crèche, il a fait un goûter avec les autres grands enfants de la crèche pour son anniversaire, et c’était vraiment super de le voir intégré dans le groupe.
Que préconisez-vous à des parents d’enfants en situation de handicap ?
Les parents du premier enfant ont fait 10 crèches avant d’en trouver une qui accueille leur enfant. Je pense qu’une micro-crèche est vraiment l’idéal pour accueillir un enfant en situation de handicap au vu de l’effectif réduit d’enfants.
Mais aussi, la micro-crèche permet à chaque enfant de faire son chemin d’éveil avec le temps dont il a besoin.
Qu’en retenez-vous ?
Je retiens surtout la finalité : les parents étaient très touchés, et grâce à toute mon équipe, on a pu accompagner l’éveil des deux enfants.
Je ne connaissais pas l’autisme, mais cela m’a permis de m’ouvrir à un monde et j’ai pu développer ma force d’adaptation.
Il ne faut pas craindre le handicap. Les gens en ont souvent peur parce qu’ils craignent l’inconnu et ils ne savent pas vraiment ce que c’est, mais être autiste est une autre façon d’être au monde, c’est tout. Et derrière une particularité, il y a un être humain. Toute l’équipe et la crèche ont grandi à travers ces deux accueils.
Une référente d’un des enfants veut maintenant se former dans l’accompagnement d’enfants en situation de handicap, et c’est super.